L’image a fait le tour du monde et a serré le cœur de millions de fans : Phil Collins, l’une des plus grandes icônes de la musique des 40 dernières années, sur scène, assis, visiblement affaibli, mais chantant avec une passion intacte. Les gros titres des journaux se sont rapidement emparés de cette vision, peignant le portrait d’un homme brisé par la maladie. On a parlé de ses problèmes de dos, de ses opérations, de sa difficulté à marcher. Mais cette représentation, bien que factuellement correcte, est terriblement incomplète. Elle occulte une vérité bien plus complexe et, à bien des égards, plus inspirante.
La vérité sur la santé de Phil Collins ne se résume pas à une liste de diagnostics médicaux. C’est l’histoire d’un combat acharné contre la douleur, d’une lutte psychologique pour conserver son identité d’artiste et d’une résilience humaine hors du commun. Pour comprendre réellement ce que traverse la légende de Genesis, il faut aller au-delà des communiqués de presse et des articles sensationnalistes. Il faut explorer ce que les médias ne vous disent pas : l’impact mental de la déchéance physique, la force puisée dans la musique elle-même et le soutien indéfectible qui lui a permis de faire ses adieux à la scène, à sa manière.
Cet article se propose de lever le voile. Non pas pour s’apitoyer, mais pour comprendre. Pour rendre hommage non seulement au musicien de génie, mais aussi à l’homme qui, face à l’adversité, a refusé de laisser le silence gagner.
La Chronique d’une Santé Fragilisée : Le Parcours du Combattant

Pour saisir la portée de son combat, il est essentiel de revenir sur la chronologie de ses problèmes de santé, qui sont interconnectés et ont créé un effet domino dévastateur au fil des ans.
Les Problèmes de Dos : La Genèse d’un Long Calvaire
Tout semble commencer ici. Pendant des décennies, Phil Collins n’était pas seulement un chanteur à la voix d’or ; il était une bête de scène, un batteur d’une puissance et d’une technicité rares. Sa posture, légèrement voûtée derrière son kit, est devenue emblématique. Mais ce style unique a eu un coût exorbitant. Des années de tournées et de sessions d’enregistrement ont martyrisé sa colonne vertébrale.
Le point de rupture survient en 2007, lors de la tournée de réunion de Genesis. Collins subit une dislocation d’une vertèbre dans le haut du cou. Comme il l’a expliqué plus tard dans son autobiographie “Not Dead Yet”, cette blessure a provoqué des lésions nerveuses dans ses mains, le privant progressivement de la sensation nécessaire pour tenir ses baguettes. Pour un batteur, c’est une condamnation.
Les interventions chirurgicales se sont enchaînées. Une première opération en 2009 pour réparer la vertèbre, suivie d’une autre en 2015, cette fois dans le bas du dos. Malheureusement, ces opérations n’ont pas seulement échoué à restaurer sa capacité à jouer, elles ont aussi entraîné des complications. Des sources comme la BBC ont rapporté que ces interventions l’ont laissé avec des lésions nerveuses permanentes. C’est le début d’un calvaire qui va redéfinir sa vie et sa carrière.
Les Lésions Nerveuses et la Perte de Mobilité
Les conséquences des opérations et de la dégradation de sa colonne vertébrale ne se sont pas limitées à ses mains. Le problème le plus visible pour le grand public est le “pied tombant” (ou “foot drop”). Cette condition, souvent le résultat de lésions nerveuses, l’empêche de relever la partie avant de son pied, rendant la marche extrêmement difficile et dangereuse.
C’est la raison pour laquelle Phil Collins est apparu systématiquement avec une canne à partir de 2016, puis dans un fauteuil roulant pour les déplacements plus longs. Sur scène, lors des tournées “Not Dead Yet” et “The Last Domino?” de Genesis, il était contraint de chanter assis. Loin d’être un caprice de star, cette chaise était une nécessité médicale absolue. Des ressources médicales comme la Mayo Clinic expliquent en détail comment cette affection neurologique affecte la démarche et l’équilibre, augmentant considérablement le risque de chutes. Une chute grave, dans son état, aurait pu être catastrophique.
Le Diabète et Autres Complications
Comme si le fardeau n’était pas assez lourd, Phil Collins a également été diagnostiqué avec un diabète de type 2. Cette maladie chronique a ajouté une couche de complexité à sa gestion de la santé. Le diabète peut, à lui seul, exacerber les problèmes nerveux (neuropathie diabétique) et affecter la circulation sanguine, compliquant la guérison et la condition physique générale.
En 2017, une chute dans sa chambre d’hôtel, causée par son pied tombant, l’a envoyé à l’hôpital avec une vilaine coupure à la tête, forçant le report de plusieurs concerts. De plus, il a souffert d’une pancréatite aiguë, une inflammation soudaine et très douloureuse du pancréas qui peut être potentiellement mortelle et est parfois liée à des complications du diabète ou à la consommation d’alcool, un sujet sur lequel il s’est ouvert avec une franchise désarmante.
Cette accumulation de maux – dos, nerfs, diabète – a créé un cercle vicieux où chaque problème en aggravait un autre, le plongeant dans un état de fragilité constante. C’est cette image, celle de l’homme physiquement diminué, que les médias ont largement diffusée. Mais ils ont oublié de raconter l’autre moitié de l’histoire.
Ce que les Médias ne Vous Disent Pas : L’Homme Derrière la Maladie
Se concentrer uniquement sur le dossier médical de Phil Collins, c’est passer à côté de l’essentiel. C’est ignorer la dimension psychologique, la force de caractère et la passion artistique qui définissent sa réponse à l’adversité.
L’Impact Psychologique : La Perte d’une Partie de Soi
Ce que les caméras ne montrent pas, c’est le coût mental d’une telle dégradation. Imaginez être l’un des batteurs les plus célèbres et respectés au monde, et du jour au lendemain, ne plus pouvoir faire ce qui définit votre identité. Dans plusieurs interviews, notamment avec le magazine Rolling Stone, il a parlé avec une honnêteté poignante de la dépression qui a suivi.
La perte de sa capacité à jouer de la batterie n’était pas seulement une limitation physique ; c’était une amputation de son âme d’artiste. Il a avoué avoir eu des pensées sombres, se sentant inutile. La musique, qui avait été son refuge, devenait une source de frustration. Comment composer, comment s’exprimer, quand son principal instrument lui est interdit ?
De plus, être constamment sous le regard du public a ajouté un poids énorme. Chaque photo de lui avec une canne, chaque vidéo le montrant marchant avec peine, était disséquée, commentée. Il a dû faire face non seulement à sa propre douleur, mais aussi à la pitié ou à la curiosité morbide des autres. C’est une bataille invisible, menée loin des scènes, mais qui demande une force mentale colossale.
La Résilience par la Musique : “Not Dead Yet”
Et c’est là que réside la véritable histoire. Au lieu de sombrer, Phil Collins a fait un choix : se battre. Le titre de son autobiographie et de sa tournée de retour, “Not Dead Yet” (Pas Encore Mort), n’était pas une simple provocation. C’était un cri de guerre.
1. Réinventer sa Présence Scénique : Ne pouvant plus être le showman bondissant ou le batteur explosif, il a dû tout réapprendre. Assis au centre de la scène, il a transformé sa contrainte physique en une nouvelle forme de force. Son immobilité a recentré l’attention sur l’essentiel : sa voix. Privé de ses gestes, il a mis toute son énergie, toute son émotion dans son chant. Les spectateurs des dernières tournées ont été témoins de performances d’une vulnérabilité et d’une intensité rares. La fragilité de son corps contrastait avec la puissance intacte de sa voix, créant des moments d’une grâce poignante.
2. La Transmission : La décision la plus symbolique et touchante a été de confier les baguettes à son fils, Nicholas Collins. Voir Nic, avec la jeunesse et la puissance que son père n’avait plus, jouer les parties de batterie légendaires de Genesis et de sa carrière solo, n’était pas un simple remplacement. C’était une transmission, un passage de flambeau émouvant. C’était la manière de Phil de dire : “Mon corps ne peut plus, mais mon esprit, mon héritage, continuent à travers mon fils.” Cette collaboration a insufflé une nouvelle vie à la musique et a offert une magnifique histoire de famille et de continuité artistique.
3. La Voix, le Dernier Rempart : Malgré toutes ses affections, sa voix, bien que légèrement patinée par le temps, est restée remarquablement solide. Il a travaillé pour la préserver, pour continuer à livrer des performances vocales de haut niveau. Elle est devenue son unique instrument sur scène, son dernier lien direct et physique avec la musique qu’il a créée.
Le Soutien de “Genesis” : Une Famille jusqu’au Bout
La dernière tournée de Genesis, “The Last Domino?”, n’aurait jamais pu avoir lieu sans le soutien indéfectible de ses complices de toujours, Mike Rutherford et Tony Banks. Les médias ont souvent présenté le groupe comme une entité musicale, mais dans cette épreuve, ils ont agi comme une famille.
Les interviews du groupe à l’époque révèlent à quel point ils ont adapté toute la tournée autour de l’état de Phil. Le rythme des concerts, la logistique, l’agencement de la scène… tout a été pensé pour lui permettre de tenir le coup. Sur scène, les regards échangés entre les trois membres fondateurs en disaient long. Il n’y avait pas de pitié, mais une profonde affection et un respect immense pour le courage de leur ami.
Le site officiel de Genesis a documenté cette dernière aventure, mais c’est dans les témoignages des fans et les critiques de concerts que l’on a perçu cette alchimie. La tournée n’était pas seulement un adieu musical ; c’était la célébration d’une amitié de plus de 50 ans, soudée face à l’épreuve finale. Rutherford et Banks n’ont pas simplement partagé la scène avec une star diminuée ; ils ont porté leur ami pour qu’il puisse recevoir une dernière fois l’amour de son public.
L’État de Santé Actuel en 2025 : Vivre Loin des Projecteurs
Depuis le concert final de Genesis à Londres en mars 2022, Phil Collins s’est retiré de la vie publique. Les informations sur son état de santé actuel sont rares, ce qui alimente naturellement les rumeurs. Cependant, selon les déclarations de ses proches, comme Mike Rutherford, il profite d’une retraite méritée, bien qu’il soit “bien plus immobile qu’avant”.
En 2025, il est probable que sa condition physique ne se soit pas améliorée. Les maladies dégénératives et les lésions nerveuses de cette nature ont rarement une évolution positive. Il vit une vie tranquille, loin de l’agitation des tournées. Ce silence médiatique n’est pas le signe d’une dégradation alarmante, mais plutôt le choix conscient d’un homme qui a tout donné et qui souhaite désormais vivre ses jours dans la paix et l’intimité, entouré de sa famille.
Il a livré son dernier combat sur scène, non pas pour la gloire ou l’argent, mais pour boucler la boucle, pour terminer son histoire musicale selon ses propres termes.
Conclusion : Plus qu’un Survivant, une Leçon de Vie
La vérité sur la santé de Phil Collins est bien plus nuancée que le portrait tragique souvent dépeint. Oui, le bilan médical est lourd. Oui, l’image de sa fragilité est poignante. Mais ce que les médias omettent souvent de souligner, c’est l’incroyable force d’âme qui se cache derrière.
Phil Collins nous a offert une dernière leçon magistrale. Il nous a montré que la passion peut transcender la douleur physique. Que l’identité d’un artiste n’est pas confinée à ses capacités physiques, mais réside dans sa volonté de créer et de partager. Il a prouvé que la vulnérabilité, lorsqu’elle est assumée avec courage, peut devenir une source de force et de connexion humaine profonde.
Son héritage ne se mesurera pas seulement au nombre de disques vendus ou aux stades remplis. Il se mesurera aussi au courage d’un homme qui, alors qu’il aurait pu légitimement tout arrêter, a choisi de remonter sur scène, de s’asseoir sur cette chaise et de chanter. De chanter “Against All Odds”, “In the Air Tonight”, “Land of Confusion”. Jusqu’au tout dernier souffle, jusqu’à la toute dernière note. Et pour cela, l’histoire ne doit pas seulement retenir sa maladie, mais surtout, sa monumentale ténacité.